Pourquoi tant de personnes dorment mal aujourd’hui ?
La question du sommeil occupe de plus en plus de place dans nos vies, et ce n’est pas un hasard : une personne adulte sur trois déclare souffrir de difficultés de sommeil en France (Source : INSV/MGEN Baromètre 2023). Si nos modes de vie hyperconnectés, le stress et les rythmes irréguliers sont souvent pointés du doigt, il existe aussi des solutions qui tiennent à notre mode de vie. Parmi elles, l’activité physique joue un rôle bien plus important que ce que l’on pense souvent.
L’activité physique : un levier reconnu pour mieux dormir
Il ne s’agit pas ici seulement de « se fatiguer » pour arriver à trouver le sommeil. L’activité physique a des effets multiples, qui touchent aussi bien la rapidité d’endormissement, la durée du sommeil que sa qualité.
- Plus vite endormi·e : Les personnes actives s’endorment en moyenne 27 minutes plus vite que les personnes sédentaires (Source : Sleep Medicine Reviews, 2017).
- Un sommeil plus profond : Plusieurs études montrent une augmentation significative du sommeil à ondes lentes, la phase dite « réparatrice », chez les personnes pratiquant une activité physique régulière (National Sleep Foundation).
- Moins de réveils nocturnes : Le nombre de réveils au cours de la nuit diminue chez celles et ceux qui intègrent l’exercice dans leur quotidien.
Mais pour profiter de ces effets, encore faut-il comprendre quels types d’activités sont efficaces et comment les intégrer sans perturber ses nuits.
Quels mécanismes expliquent le lien entre activité physique et sommeil ?
Le mouvement agit sur le corps et l’esprit de différentes manières, ce qui explique son impact sur le sommeil :
- Une régulation des hormones L’exercice favorise la sécrétion d’endorphines (hormones du bien-être) dans la journée, et diminue le taux de cortisol (l’hormone du stress) en soirée. Ce rééquilibrage hormonal facilite l’endormissement et réduit les réveils nocturnes (Source : Journal of Clinical Sleep Medicine, 2014).
- Une synchronisation de l’horloge biologique L’activité physique, surtout lorsqu’elle est pratiquée en extérieur, aide à réguler notre rythme circadien, c’est-à-dire notre horloge interne. Elle encourage la libération de mélatonine au bon moment, l’hormone clé de l’endormissement.
- Une réduction de l’anxiété et de la dépression Les troubles de l’humeur et le stress sont parmi les principales causes d’insomnie. Les études montrent que l’exercice régulier, même d’intensité modérée, réduit significativement l’anxiété et la rumination mentale qui perturbent l’endormissement (Source : Sleep Health, 2019).
Quels types d’activité physique favorisent le sommeil ?
Il n'est pas nécessaire de courir un marathon ou de passer des heures à la salle de sport pour bénéficier des vertus du mouvement sur le sommeil. Plusieurs formats d’activité physique ont montré leur efficacité, parfois de façon complémentaire :
- L’endurance douce (marche rapide, vélo, natation, etc.) : Pratiquée 30 à 40 minutes, 3 à 5 fois par semaine, elle améliore significativement la durée totale de sommeil et la qualité du sommeil profond (Source : American Journal of Lifestyle Medicine, 2020).
- Les exercices de résistance (musculation, Pilates, renforcement musculaire) : Ces exercices favorisent la récupération musculaire la nuit et diminuent les symptômes de jambes sans repos.
- Les activités corps-esprit (yoga, tai-chi, qi-gong) : Elles combinent activité physique et gestion du stress et ont montré une efficacité spécifique sur les troubles du sommeil liés à l’anxiété chez les adultes comme chez les seniors (Sleep Foundation).
Le simple fait de marcher régulièrement pendant 20 minutes chaque jour ou de s’offrir 10 minutes d’étirements doux en début de soirée peut déjà faire une différence concrète sur le sommeil.
À quel moment faire du sport pour optimiser ses nuits ?
Le moment où l’on pratique une activité physique joue aussi sur ses effets. Une idée reçue affirme qu’il faut absolument éviter toute activité après 18h pour bien dormir. Ce n’est pas si simple :
- En matinée ou en journée : Pratiquer une activité physique avant 17h aide à synchroniser l’horloge biologique et favorise un bon rythme veille/sommeil, en particulier si on s’expose à la lumière naturelle.
- En début de soirée : Un exercice modéré (yoga, marche douce, étirements) dans les 2 à 3h avant le coucher n’altère pas la qualité du sommeil, et peut même détendre et préparer le corps à la nuit.
- Juste avant le coucher : Des séances intensives peuvent, chez certaines personnes, générer une élévation de la température corporelle et retarder l’endormissement. L’idéal reste d’observer comment réagit son corps.
Une étude de 2018 publiée dans Sports Medicine a ainsi révélé que l’activité physique le soir, si elle reste modérée, n’a pas d’effet perturbateur significatif, voire au contraire un effet positif sur l’endormissement.
Points de vigilance et particularités selon l’âge et la condition physique
Quels que soient l’âge ou les éventuels soucis de santé, il existe des bénéfices à adapter l’activité physique à ses capacités. Quelques repères :
- Chez les seniors : Pratiquer une activité physique douce (marche, gym adaptée, jardinage) augmente le temps de sommeil profond de près de 15 % en moyenne chez les plus de 65 ans (Source : Journal of Aging and Physical Activity, 2020).
- Chez les enfants et adolescents : L’activité physique aide à limiter l’insomnie d’endormissement et à réguler le sommeil lors des périodes de croissance, à condition de limiter les activités trop intenses dans l’heure précédant le coucher.
- En cas de maladies chroniques (diabète, troubles cardio-vasculaires, douleurs chroniques...) : Des études démontrent qu’une activité physique adaptée contribue à améliorer la qualité du sommeil tout en diminuant douleurs et fatigue diurne (Frontiers in Neurology, 2014).
L’essentiel est d’adapter l’intensité, la durée et le type d’activité à son état de santé, et d’avancer à petits pas plutôt que de viser « toujours plus ».
Quelques idées concrètes pour intégrer le mouvement au service du sommeil
- Marcher 15 à 30 minutes après le repas du soir, en variant le rythme selon la fatigue du jour.
- Adopter une courte routine d’étirements pour détendre le dos, les épaules et les jambes avant de se coucher.
- Intégrer une séance de yoga nidra ou de méditation en mouvement en soirée, deux pratiques particulièrement adaptées pour calmer le mental.
- Privilégier les escaliers ou les petits déplacements à pied dans la journée pour éviter la sédentarité, même en période de fatigue.
- Faire une pause mouvement toutes les deux heures si le travail est sédentaire (quelques flexions, rotations du tronc, mouvements d’épaule...)
Le plus important reste la régularité : les effets sur le sommeil commencent généralement à se faire sentir après 2 à 4 semaines de pratique assidue.
Ressources pour aller plus loin
- Institut National du Sommeil et de la Vigilance : conseils, brochures pratiques, annuaire des centres du sommeil.
- Sleep Foundation : études, guides vulgarisés sur sommeil et activité physique.
- Dossier sur l’activité physique et sommeil (Vidal)
- HAS - Sommeil et troubles du sommeil
Mieux dormir ne relève donc pas uniquement d’un « don » ou d’un coup de chance : c’est aussi un apprentissage corporel progressif, à la portée de chacune et chacun. L’activité physique, lorsqu’elle est régulière et adaptée, est un allié de taille pour renforcer, jour après jour, la qualité de ses nuits et la vitalité de ses journées. Pour bon nombre de personnes, le mouvement, même discret ou modéré, reste la plus naturelle des médecines du sommeil.